La Micheline

 

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Car "GEP" (Guerrero, Escudié, Pons). Ce prototype, est photographié au cours d'essais en gare de Quillan. Devait assurer la ligne Quillan-Axat-St Paul-Perpignan.
N'a jamais roulé commercialement.
Le problème était que les roues arrières roulant directement sur le ballast il passait mal aux aiguillages.

En gare de Carcassonne, la Micheline et sa remorque que beaucoup d'habitants de la Haute-Vallée ont empruntée pendant la dernière guerre.

 

À gauche et à droite, deux "vraies" Michelines

UN AUTORAIL HYBRIDE

Le nouvel autorail qui, sur le bout de rail joignant Quillan à Carcassonne tire, à la sage moyenne de quelque 40 km-h., une remorque aussi bondée que lui-même n'appartient manifestement pas à la grande lignée des Bugatti, détentrices du ruban bleu de leur spécialité, ou de ces trains automoteurs aux longues voitures couplées lancés peu d'années avant la guerre sur le parcours Paris-Lille. Semblant, au contraire, faire retour vers le passé, il s'apparenterait plutôt aux débutantes « Micheline ». Mais, par ailleurs, quelle supériorité n'est pas la sienne ! Pour peu qu'une voie de garage se présente, lui permettant de dégager la voie principale, il lui suffit d'un petit et simple dispositif pour abandonner le rail et reprendre la route comme un vulgaire autocar qu'au fond il n'a jamais cessé d'être. Ce qu'en termes inattendus dénonçait le chef de gare de Carcassonne, à qui, dès notre arrivée, nous demandions où était l'autorail : Monsieur, nous répondit-il, il est en ville.

Tel est bien, en effet, le trait caractéristique de l'engin hybride, mi-route, mi-rail, cependant plus route que rail, adapté à ce double usage par M. Talon, ancien ingénieur principal des chemins de fer. En soi, l'invention ne porte en rien sur le véhicule. Elle est proprement ferroviaire en ce sens qu'elle tient tout entière dans le dispositif d'adaptation au service ferroviaire. Tout le problème posé ne se limitait-il pas à ceci : « Etant donné un autocar à écartement des roues et à gabarit convenables, comment procéder pour qu'il puisse passer de la route au rail et inversement et accomplir sur le rail la même fonction de transport qu'il accomplit normalement sur la route » ?

Soit un bâti de bois en dos d'âne légèrement plus élevé que le rail. Ce bâti est disposé sur la voie de manière que du côté route le car puisse l'escalader sans transition et du. côté rail avoir ses roues avant prises entre deux sortes de glissières guides placées dans l'exact prolongement des deux rails. A la sortie du bâti est engagé sur la voie un double petit chariot métallique articulé, type lorry, indépendant et constituant une plate-forme de roulement. Descendant la pente du dos-d'âne, le car met ses roues avant, sur la partie du chariot comprise entre des deux éléments, chacun de ces éléments étant à quatre roues. Un dispositif bloque hermétiquement les roues du car sur le chariot, afin qu'elles ne fassent qu'un avec lui.

C'est ensuite au tour des roues arrière de prendre place. Mais, au contraire des roues avant, directrices et auxquelles se sont substituées dans cette fonction les roues du double chariot, les roues arrière motrices, demeureront en contact direct avec le rail. Seulement, elles devront être guidées. A cet effet deux lorry à quatre roues reliées par un élément métallique rigide les encadreront. Pour placer ses roues motrices dans cet ensemble préalablement avancé sous le bâti et mû à la main, le car n'aura qu'à parcourir quelques mètres. Automatiquement les roues prendront position. Mais, comme elles sont jumelées, seules les roues intérieures porteront sur les rails, les roues extérieures les débordant.

À cet instant, la transformation est opérée et l'autocar est devenu autorail. Sa silhouette est extravagante, car le capot est surélevé par rapport à l'arrière du fait que les roues avant sont assises sur le chariot de direction. Mué en mécanicien, le chauffeur ignorant son volant n'a plus à se préoccuper que de son embrayage, ses vitesses, son frein et des signaux. Attelé à une remorque, l'autorail arrive à tirer gaillardement quelque deux cent cinquante voyageurs les .jours de presse. Comme carburant, du gaz comprimé fourni par une usine de la région.

On imagine suffisamment l'opération inverse qui restitue à l'autorail sa qualité et sa nature d'autocar pour qu'il soit inutile de l'exposer. De même aperçoit-on que les services à attendre de cet hybride nouveau venu (services que trois mois d'essais consécutifs sont en passe de démontrer) ne présenteront, en toute probabilité, qu'un intérêt local. L'autorail Talon, au cas où l'expérience lui serait favorable, verrait donc se limiter le champ de ses applications aux lignes secondaires. Si la liaison rail-route, dont il faudra bien reprendre l'étude et chercher la réalisation quand toutes choses seront redevenues normales, admet encore certains des principes d'avant 1939, il ne paraît guère douteux que, par sa souplesse, sa facilité d'articulation et le fait qu'il diminue les pertes de temps de manutention comme de transbordement, un tel outil ne soit excellent dans le porte à porte. Cela, bien entendu, sous réserve de nombre de considérations, à commencer par celles d'ordre technique et de prix de revient.

Mais, pour l'instant, ne cherchons pas si loin. Nous nous trouvons en présence d'un outil qui, né dans une période d'exception, satisfait des besoins d'exception dans des conditions d'exception. Ce n'est déjà pas si mal. Bien mieux, c'est, avec une sorte de pitoyable tendresse que nous devrions considérer ce produit si archaïque dans sa configuration, si peu « chemin de fer » dans sa chétivité et cependant si ambitieux et si grand dans son objet et son symbole.

Extrait du magazine « L’Illustration » du 4 Septembre 1943

L'autorail Quillan-Carcassonne circulait en entente entre la compagnie C.C.T.C. (Compagnie Carcassonnaise de Transports en Commun) ,dite Citroën, et la Société Bourdier. C'est Monsieur Talon (de Belvianes), ancien ingénieur des Chemins de Fer, et Monsieur Bourdier qui ont exploité ce système en collaboration.

Les roues arrières motrices du car roulaient sur les rails et étaient maintenues par un lorry* qui les guidait.

Les roues avant étaient aussi maintenues sur un lorry et ne touchaient pas aux rails.

Le freinage du train était assuré par la remorque uniquement (le système de freinage n'était pas compatible entre les deux véhicules). Le receveur freinait l'ensemble dans les gares et dans les descentes en actionnant le frein à main qui bloquait les roues de la remorque, sur ordre du chauffeur du car qui actionnait le klaxon du car selon un code convenu.

Le carburant employé était le gaz en bouteilles qui provenait de Saint Gaudens.

L'avantage de l'ensemble était qu'avec un seul moteur on transportait trois ou quatre fois plus de voyageurs que par la route. Le carburant et les pneumatiques étaient rares en cette période de guerre.

À l'arrivée (Carcassonne et Quillan), il fallait tourner le car sur un pont tournant pour le mettre dans la direction opposée.

En hiver, il arrivait que, suite au gel ou à la neige sur les rails, il faille pousser le car. Les plus jeunes voyageurs descendaient alors et poussaient à l'arrière de la remorque, et, quand le roulage était à nouveau bon, ce que le chauffeur signalait par quelques coups de klaxon, les voyageurs restés dans la remorque récupéraient les jeunes qui courraient le long de la voie en les aidant à remonter dans la remorque.

Cette "Micheline" locale était conduite par Monsieur Élie Ferrase.

* lorry : petit chariot à 4 roues, constituant un wagonnet plat que l'on pousse à la main sur une voie ferrée, et utilisé pour le transport des matériaux.

 

L'Association tient à remercier MM. Alain et Roger Nautré, ex-animateurs du "Train Cathare", qui nous ont fourni l'essentiel de la documentation pour la rédaction de cette page.

 

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